Dans le chapitre précédent, j'ai grandi et pris mon propre style. Eris a fugué. 

Lorsque l'agitation retomba, ce matin là, je descendis et fus accueillie joyeusement par Foxy. La petite chatte se frotta contre moi. Je n'attendis pas plus pour sortir la brosse. Elle était de bonne humeur et ne se débattît pas lorsque je passa l'objet sur son poil, comme il arrivait parfois. Elle ronronnait gaiement. 

Sans nul doute était-elle fatiguée par sa nuit écourtée et se recoucherait-elle très vite. 

Enfin, lorsque je me leva, je sentis l'animal se coucher contre mes pieds. Elle était vraiment exténuée. Je la pris dans mes bras et la coucha sur le sofa. Elle me regarda puis ferma les paupières avant de s"endormir. 

On sonna à la porte. Pauvre Foxy, décidément aujourd'hui, rien ne s'accordait à son sommeil. 

Une pizza. Curieux, je n'en avais pas commandé. Quelqu'un d'autre serait levé ou est ce une erreur? Je l'accepta tout de même, affamée. Et puis ni papa ni maman ne devait être réveillé encore, du coup, je pourrais me faire plaisir plutôt que de prendre un simple petit déjeuner avec un bol de céréale. Pour une fois que je déroge un peu à mon rôle d'enfant modèle, on me pardonnera bien facilement mon écart.. 

Juste après mon repas, je m'empressa de rentrer dans ma chambre pour écrire pour Kaon, sous l'oeil attentif d'une araignée posée sur le bureau et dont la présence ne m'incommodait pas. Je n'ai jamais été belliqueuse envers les insectes, tant qu'ils ne me gênent pas, j'apprécie presque d'avoir cette araignée près de moi. Elle me ressemble, nous sommes toutes les deux témoins des autres plus qu'acteurs de leur vie. Moi, du fait de devoir noter réfléchir aux pourquoi et comment des actes de mes proches afin de retranscrire au plus proche de la réalité les vies de mes proches et, toi, petite araignée simplement posé sur sa toile à attendre une proie.

Je fus trop vite, à mon goût, arrêté pas un mystérieux message d'Insomnie me demandant de le rejoindre à la nursery. 

Durant la même période, maman et papa étaient dans la cuisine. Comme toujours, amoureux et Eris, revenue de sa fugue de la nuit par elle-même ne pouvait plus le nier. Sur son visage, il n'était pas difficile de voir sa déception. Et cette même déception inquiétait notre mère. 

Je vous ai déjà assez exprimé ce que je ressentais vis à vis de cette relation mais plus ça avance et plus ça me désespère. Le seul a avoir le pouvoir de les aider toutes les deux seraient papa mais je le comprends. Il n'est pas instable. En plus d'être une maladie mortelle, l'instabilité peut donner des crises, nous rendant.. difficiles à vivre. Et la première victime de ces crises est Eris. Ses crises largement plus importantes que les nôtres, fautes de réels traitements, finiront par réellement... mal tournée pour lui s'il la contredit encore. Ca m'étonne presque qu'il soit sorti indemne de la dernière. 

Malgré tout, j'aime à croire que, si cette nuit, elle n'est pas partie, pas définitivement du moins, c'est parce qu'elle veut comprendre. Elle veut comprendre notre famille et s'y intégrer. C'est un pas en avant dans le traitement de ses crises. Avec l'aide de maman, elle pourrait s'en relever, j'en suis sûre. Maman a l'habitude d'aller à l'hôpital une fois par semaine pour ses crises, en moyenne, pour un bilan. Mais ça n'arrivera pas, n'est ce pas? Vous le savez aussi bien que moi maintenant. Aucune des deux n'ira vers l'autre pour se réconcilier.. 

Insomnie m'avait demandé de le rejoindre dans la nursery. Je le trouvais le regard figé sur le landau, le landau dans laquelle j'ai grandi, dans la nursery dans laquelle nous nous sommes rencontrés. Il semblait étrange, comme s'il s'était fixé sur quelque chose, qu'il avait déjà déterminé ce qu'il allait faire. 

Et pourtant il se taisait. Soucieuse, je lui ai demandé pour le faire sortir de sa bulle: 

Midnight: Nostalgique? 

Il sembla revenir à lui. Sans un mot, il se tourna vers moi. 

Sans plus de parole, il me prit dans ses bras. Combien de fois avais je rêvé qu'il ne le fasse? Je ne résista pas, me laissant prendre entre ses membres chauds. Il me chuchota doucement: 

Insomnie: Je t'aime, Midnight. Je suis fou de toi. 

J'aurais dû être heureuse. Depuis le temps que j'attendais qu'il me dise ces mots. Et pourtant quelque chose n'allait pas. Je n'étais pas heureuse, pas satisfaite. Quelque chose en moi bloquait. Je pensais sans cesse à lui, je le désirais, je l'aimais profondément depuis si longtemps... Il était l'incarnation de la bravoure, pour moi il avait risquer sa vie. Il avait menti pour ne pas m'impliquer dans ces soucis. Alors qu'est ce qui n'allait pas? C'était lui qui venait vers moi, pas l'inverse donc lui aussi me souhaitait. 

Doucement ses lèvres se rapprochèrent des miennes. Je sentais son souffle chaud sur ma peau. Je voulais qu'il aille plus vite, je voulais qu'il mette fin à mes doutes et pourtant il semblait se complaire dans ce rythme. Il semblait presque attendre, attendre que je réponde à son amour. Il me testait, il ne voulait pas se tromper? 

Et pourtant, c'était le cas. Je ne pouvais simplement pas me permettre cette relation, c'était dire que ces dernières années n'étaient que du vent, qu'il n'avait jamais été mon frère. Je pouvais être reconnaissante pour m'avoir sauvée, protégée mais, en temps qu'héritière, je devais m'approcher de la perfection et refuser nos sentiments. Dès lors qu'il est devenu mon frère, il n'a plus été possible que nous ayons une relation de ce type, ça avait quelque chose de malsain. Et c'est de là que venait ce profond sentiment de malaise qui m'a envahie lorsqu'il s'est déclaré. 

Il pleuvait ce jour là. Ce jour où je décidais finalement qu'il n'était que mon frère. Ce jour où pour la première fois, je prenais une décision d'héritière plutôt que de simplement laisser mes sentiments corrompre mon jugement. Ce jour là, je renonçais en même temps à mon désir pour Insomnie. 

Et, ce soir là, le ciel n'était plus observé que d'une seule personne. Ce soir là, il n'y avait plus qu'une seule personne à vouloir quitter le foyer. 

Oui, ce soir là, malgré la promesse qu'il avait fait d'éternellement me protéger, Insomnie, dans cette chambre jaune qui m'avait vu grandir se demandait s'il ne devait pas prendre sa liberté, partir comme il était arrivé. 

Et, ce soir là, une vieille femme se décidait à devenir mère à nouveau, malgré le scepticisme de son mari, elle voulait prouver qu'elle pouvait être une bonne mère, comme avec moi. Ce soir là, tout était prêt à ce qu'elle puisse épanouir son souhait d'à nouveau enfanter, d'à nouveau pouponner. 

Et bien entendu, papa ne se fit visiblement pas prier pour l'aider à concevoir ce nouvel être, sans doute sans réellement le savoir. Ce nouvel être serait une bonne chose pour la famille, non? Elle l'aiderait à prendre un nouveau départ, n'est ce pas? 

~Fin du chapitre 25~